Le
10 septembre 2008 : (13:00
Unità Naziunale,
www.unita-naziunale.org - Corse - Lutte internationale)
Arrêt de la Cour d’appel de
Nouméa le 9 septembre 2008. Article paru dans Les
Nouvelles-Calédoniennes.
Sur le fond, le dossier des
violences de Carsud en janvier dernier, est bouclé. La cour d’appel
a revu à la baisse les peines de prison ferme prononcées par le
tribunal contre Gérard Jodar et une vingtaine de militants. S’il se
dit prêt à aller au Camp-Est, le président de l’USTKE brandit
cependant le spectre du désordre que causerait, selon lui, son
embastillement.
Le couperet est tombé
hier matin, dans une salle d’audience désertée par les principaux
intéressés. La cour d’appel a confirmé toutes les condamnations des
vingt-deux militants USTKE impliqués dans les violences de janvier
dernier, aux abords du dépôt Carsud de Normandie. Les juges de
deuxième instance ont cependant revu à la baisse les condamnations
prononcées en mars dernier par le tribunal correctionnel. Gérard
Jodar, coupable de « provocation directe à un attroupement armé et
complicité de violences aggravées » voit ainsi sa peine de prison
ferme réduite de moitié : douze mois de prison, dont trois ferme.
Idem pour les autres militants, dont les peines oscillent entre un
mois ferme (couverte par la préventive pour certains d’entre eux),
deux et quatre mois ferme.
Les juges de la cour
d’appel ont également fait sauter l’interdiction des droits civiques
qui concernait cinq prévenus, dont Gérard Jodar. En revanche, ils
ont solidairement condamné les vingt-deux militants à payer à l’Etat
la somme de 16 millions (16 102 026 francs exactement),
correspondant selon le Trésor public aux dégâts occasionnés sur les
véhicules de police et de gendarmerie. Reste qu’après ce délibéré,
Me Cécile Moresco, l’avocate de l’USTKE, affichait plutôt sa
satisfaction.
« Ce n’est pas une
victoire, car nous avions plaidé la relaxe, mais la décision de la
cour d’appel est plus raisonnable que celle du tribunal
correctionnel. » Le conseil s’est particulièrement félicité de
l’abandon de la privation des droits civiques. L’avocate
n’envisageait pas de pourvoi en cassation sur l’arrêt pénal. « Nous
allons à présent solliciter un aménagement des peines de prison
ferme », a-t-elle indiqué. Elle se réserve cependant la possibilité
de porter le dossier devant la juridiction suprême, mais uniquement
sur le volet des intérêts civils. À savoir, la rondelette somme des
16 millions réclamée solidairement aux militants.
En huit mois, la
cause aura donc été entendue. Huit mois, c’est le temps écoulé entre
les violences de la nuit du 16 au 17 janvier devant le dépôt de
Carsud et la journée d’hier, où les juges ont refermé sur le fond le
dossier judiciaire. Autant dire que la justice n’a pas traîné.
Il y a quelques mois,
cette même diligence avait conduit le parquet à poursuivre les
militants selon la procédure de comparution immédiate. Le tribunal
correctionnel avait ensuite reconnu le « caractère politique » du
dossier, offrant ainsi une victoire procédurale à la défense.
Pierre Guillot
Derrière les barreaux ?
Hier
matin, les juges ont prononcé des peines de prison ferme. Soit. Cela
ne veut pas dire que Gérard Jodar et la vingtaine de militants ont
directement rejoint le Camp-Est. Tout d’abord, les condamnations
couvrent tout ou partie de la détention provisoire, pour ceux qui
l’ont effectuée, entre les affrontements de janvier dernier et le
premier procès de février. Ensuite, Gérard Jodar peut saisir le juge
d’application des peines pour demander un aménagement de sa
condamnation. La palette est large : semi-liberté, liberté
conditionnelle, conversion en jours-amende… Ce juge doit se
prononcer dans un délai de quatre mois à partir du moment où il est
saisi. Une fois cette étape franchie, c’est au parquet que revient
la tâche finale : celle de mettre effectivement à exécution la
condamnation.
Relaxe définitive pour le blocage du port
Hier matin, la cour
d’appel a cette fois confirmé la relaxe de Gérard Jodar dans le
cadre d’une autre affaire : celle du blocage du port, en juin 2006,
à la suite duquel le patron de l’USTKE avait été placé en garde à
vue pour un fait et interrogé sur d’autres. Ses avocats avaient
réussi à faire annuler l’ensemble de la procédure : le tribunal
correctionnel l’avait donc relaxé dans un premier temps, avant que
le parquet ne fasse appel. En juillet 2007, le second degré l’avait
condamné à des jours-amende, avant un pourvoi en cassation.
Interview de Gérard
Jodar
Quel
est votre sentiment après l’arrêt de la cour d’appel ?
Je n’ai pas commis la
moindre violence mais je suis condamné parce que je suis le
président de l’USTKE et parce que j’aurais « incité » les militants
à en commettre, alors que nous n’en avons pas été à l’origine. Une
autre chose me surprend : la cour d’appel n’a pas retenu la
privation des droits civiques, mais nous a en revanche condamnés à
payer 16 millions. Un peu comme si on nous faisait une fleur,
chèrement payée. Par ailleurs, les juges ont baissé les sanctions
quasiment de moitié, un peu moins pour l’un d’entre nous, victime
des violences policières et qui avait dénoncé cela. Nous avons
d’ailleurs des images à l’appui. On a clairement voulu dire que nous
avons été à l’origine de ces affrontements, alors ce sont bien les
policiers qui ont chargé en premier.
Parallèlement à cela, le conflit Carsud est toujours en cours.
Comment le syndicat peut-il tenir une grève aussi longtemps ?
A la fin d’une
récente réunion avec d’autres représentants syndicaux, on me disait
« de toute façon, vous à l’USTKE, vous êtes en dehors des normes. »
C’est vrai. Notre organisation nous le permet. Depuis dix mois,
vingt et un de nos adhérents sont toujours en grève à Carsud : le
syndicat règle leurs factures d’eau, d’électricité. Depuis le début
de l’année, par solidarité syndicale, nous avons ainsi déboursé
entre 700 000 et 800 000 francs par mois, soit plus de 7 millions.
Sans compter 10 millions pour les frais d’avocat. Encore une fois,
notre organisation peut se le permettre : chaque adhérent reverse
1 % de son salaire à l’USTKE, qui compte environ 6 000 adhérents.
Nous avons plus de cotisations que tous les autres syndicats réunis.
Ce n’est donc pas un hasard non plus si la justice a décidé de
frapper au portefeuille, puisqu’elle sait qu’on ne peut pas nous
atteindre sur notre capacité de mobilisation.
Reste que la cour d’appel vous a condamné à trois mois ferme.
Etes-vous prêt à aller au Camp-Est ?
Moi oui, j’en
profiterai pour faire du sport… Mais ça me fait peur pour ce qui
risque d’arriver par la suite. D’autres ne sont pas du tout prêts à
accepter de voir le président de l’USTKE derrière les barreaux. A
commencer par les gardiens USTKE du Camp-Est, qui ne veulent pas me
voir franchir les portes de la prison. Je pense aussi que d’autres
seront prêts à se lancer dans des actions qui risqueraient de
remettre en cause beaucoup de choses dans le pays. En France ou
partout ailleurs, on n’a jamais vu un responsable syndical condamné
en tant que tel à de la prison ferme (Le 7 février 2002, la cour de
cassation avait confirmé les trois mois ferme prononcés contre José
Bové, porte-parole de la Confédération Paysanne, pour le démontage
du McDo de Millau, NDLR). Pour finir, il faut bien avoir à l’esprit
que ces condamnations ne remettront absolument pas en cause les
actions du syndicat et la manière de les mener.
source :
http://www.info.lnc.nc/
Dossier
Sulidarità Kanaky :
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