Le
10 avril 2008 :
(12:59
Unità Naziunale,
www.unita-naziunale.org - Corse - Lutte internationale)
Tout est trompeur en Nouvelle-Calédonie. Derrière
l’opulence liée aux flots d’argent déversés par la métropole et aux
cours du nickel au beau fixe, le climat politique et social reste
très tendu. Le bras de fer entre l’Etat et le principal syndicat
(indépendantiste) du territoire, l’USTKE (Union syndicale des
travailleurs kanaks et des exploités) en est aujourd’hui
l’illustration la plus visible. Ce dernier a lancé à minuit un appel
à une grève générale de vingt-quatre heures. Le mot d’ordre est «la
défense du droit de grève», contestée après plusieurs licenciements
ou mises à pied de salariés ayant suivi les consignes de l’USTKE.
Tirs tendus.
A Nouméa, une trentaine
d’entreprises stratégiques devraient être bloquées, dont Carsud
(filiale de Veolia) qui assure les transports en commun dans la
province Sud de l’archipel. Devant cette société, où un piquet de
grève est installé depuis plusieurs mois, de très violents
affrontements avaient opposé le 17 janvier, durant douze heures, 500
militants de l’USTKE aux forces de l’ordre. Résultat : une trentaine
de blessés, des responsables et militants syndicaux incarcérés
durant un mois et, fin mars, un procès contre 19 membres de l’USTKE.
Le jugement a été mis en délibéré au 21 avril.
Une peine d’un an de prison, dont
six mois ferme, a été requise contre le président de l’USTKE, Gérard
Jodar, accusé d’être l’inspirateur des violences, même si il n’y a
pas personnellement participé. Hier, une mission de l’IGPN
(Inspection générale de la police nationale) est arrivée en
Nouvelle-Calédonie pour enquêter sur l’action de la police durant
les échauffourées. Etayés par des photos et une vidéo, les
témoignages sont accablants : tabassages, tirs tendus (grenades,
balles en caoutchouc, petits plombs…), menottages à des poteaux
durant plusieurs heures.
Lors de la grève générale de
demain (plusieurs autres ont déjà été lancées par l’USTKE depuis le
17 janvier), l’Etat aura de nouveau le choix. Faire le gros dos en
laissant le syndicat bloquer des entreprises, ou réquisitionner les
forces de l’ordre pour les dégager au risque de nouveaux
affrontements.
Molesse.
Le nouveau haut-commissaire en
Nouvelle-Calédonie, Yves Dassonville, est déterminé à ne pas laisser
de terrain à l’USTKE. Mais prendra-t-il le risque, demain, de
montrer ses muscles avec la certitude de nouvelles violences à la
clé ? Le syndicat indépendantiste - qui a créé en novembre un parti
politique (le Parti travailliste qui se propose notamment de «défier
la politique coloniale») -, a le vent en poupe et inquiète Paris.
Par son discours et ses méthodes,
il séduit la jeunesse kanake et bouscule la coalition
indépendantiste du FLNKS. Vieillissant, divisé entre ses
composantes, le FLNKS s’est fondu dans les institutions
calédoniennes où, conformément à l’accord de Nouméa (signé en 1998),
il participe au gouvernement local avec la droite
anti-indépendantiste. L’USTKE lui reproche notamment sa mollesse
pour obtenir les transferts de compétences que la France doit céder,
dans tous les domaines, à la Nouvelle-Calédonie d’ici à 2014. Or,
c’est avec le FLNKS, et lui seul, que l’Etat négocie toutes les
évolutions institutionnelles du territoire. A chaque nouvelle action
de l’USTKE dans l’archipel, c’est désormais beaucoup plus qu’une
simple grève qui est en jeu.
Envoyé spécial à Nouméa Antoine
Guiral
Mercredi 9 avril 2008
http://www.liberation.fr/actualite/economie_terre/320131.FR.php
© Libération
Source photo :USTKE,
Unità Naziunale, Archives du site.
Source info : USTKE
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