Jeudi
22 juin 2006 : En corse et sur la toile Corse, la cause du peuple
Basque, est une des causes que nous avons toujours défendues à
travers les sites Corses comme Unità Naziunale, le site Libertà et
les forums (Forum des Peuples en Lutte, Unità Naziunale) que nous
avons mis en place depuis la fin du siècle dernier. Voici un texte,
envoyé par l'ami Xarlo dont la référence internet se trouve en fin
de page.
Les Ghjurnate Internaziunale, qui
se tiendront cette année, à Corti, le premier week end d'Aout,
seront une nouvelle fois l'occasion de rencontrer i nostri Fratelli
di Lotta.
Voici le texte
La République Basque
26
avril 1937 en Euskadi Sud… C’est jour de marché dans la ville sainte
de Guernika… Les Basques se pressent autour des étalages de
marchands de fruits et légumes, de volailles et de vêtements comme
sur n’importe quel marché d’Europe !
Les uns commentent
les derniers événements de la guerre civile en cours, d’autres
papotent sur les petites histoires du voisinage… mais tous parlent
en basque, cette langue ancestrale héritée des Aquitains de la
Protohistoire.
16 h 30 !… Les
cloches sonnent le tocsin. Soudain un bruit sourd fait lever les
têtes vers le ciel. Une escadrille d’avions de combat survole la
ville, puis une autre. Des Junkers 452, des bombardiers Stuka, des
Heinkel 111 et des Messerschmitt larguent des bombes de 55 à 500 kg.
Toute
une population désemparée par un mitraillage infernal court en tous
sens. On relèvera près de 1700 morts et de 200 blessés graves.
Guernika est massacrée par la légion Condor qui vient soutenir
Franco.
Un prêtre est
stoppé à l’entrée de la ville : il assistera, impuissant, à
l’événement. Quand il voudra témoigner de ce qu’il a vu, auprès du
Vatican ou du gouvernement français du Front Populaire, personne ne
le croira ! Pire, la presse internationale trompée dans un premier
temps par les franquistes attribuera le massacre de Guernika aux
Basques eux-mêmes!
Guernika, c’est
aujourd’hui la fameuse toile de Pablo Picasso dédiée aux victimes de
ce jour funeste, que l’on peut voir au musée du Prado à Madrid.
Mais comment en
est-on arrivé là ?
I) Une
longue marche vers l’autonomie
De 1923 à 1930, une
Espagne multiculturelle connaît la dictature du Général Primo de
Rivera, premier ministre du roi Alphonse XIII, qui se fait
lourdement sentir dans tout le pays et plus particulièrement contre
les Basques.
Pendant ce temps, le PNB (Parti Nationaliste Basque) fondé le 31
juillet 1895 à Bilbao par Sabino Arana Goiri est devenu la
principale force politique des 4 provinces d’Euskadi-Sud. Il sera à
l’origine de deux puissants syndicats basques : celui des ouvriers (ELA
: Eusko Langileen Alkartasuna) et celui des agriculteurs (ENB :
Eusko Nekazarien Bazkuna).
Sous l’influence du
PNB, la société basque se démocratise et se décléricalise. Une
conscience nationale s’affirme en même temps que se développe la
revendication des libertés individuelles.
Les républicains gagnent les élections municipales de 1931 dans les
villes d’Espagne. Ainsi Eibar au Pays Basque proclame la république
tandis qu’à l’Est Barcelone décrète la république catalane. Le roi
Alphonse XIII abdique et prend la route de l’exil. L’Etat espagnol
devient une république.
Cette même année,
les quatre provinces basques du sud élisent à l’Assemblée
Constituante de Madrid une majorité de jeunes députés abertzade dont
Aguirre pour la Navarre, qui refusent de s’allier à un parti
espagnol qu’il soit de droite, de gauche ou du “milieu” ! Ils vont
travailler par contre en étroite collaboration avec les seize
députés nationalistes galiciens et les nombreux députés catalans.
Une nouvelle
constitution votée à Madrid ne fait qu’une toute petite place à une
éventuelle autonomie des régions. La jeune république est avant tout
espagnole et centraliste ! Son refus d’un fédéralisme clair
provoquera des malentendus regrettables qui auront des conséquences
graves pour le nouveau régime peu de temps après.
Pourtant
la Catalogne et le Pays Basque remplissent les conditions
draconiennes imposées par la Constitution espagnole pour accéder à
l’autonomie, ce qui sera effectif dès 1932 pour la Catalogne. Par
contre le gouvernement central qui voit dans les Basques un peuple
trop original et trop différent du peuple espagnol lui refuse ce
même statut !!!
Alors les maires des quatre provinces votent un projet de statut le
14 juin 1931 à Estella, statut vite combattu par le courant
“Carliste” des grands bourgeois et des militaires de Navarre qui le
trouvent trop modéré et qui préconisent, eux, la restauration des
anciens Fors, c’est-à-dire une authentique indépendance.
Le 19 juin 1932,
les Navarrais repoussent le projet à une faible majorité, tandis que
les trois autres provinces dites de “Vasconia” le votent à 80 % des
voix le 5 novembre 1933… Mais Madrid refuse toujours l’autonomie des
Basques !
Malgré tout, le PNB
dirigé par une équipe très jeune (de 25 à 35 ans) dynamise le Pays
Basque Sud durant cinq ans. Ils sont 80 000 Basques à Bilbao le jour
de Pâques 1932 pour célébrer la première fête de la patrie basque :
l'Aberri-Eguna.
II)Le
soulèvement fasciste
Pendant ce temps,
les gros propriétaires castillans et andalous mécontents du régime
républicain financent l’armée à travers tout le pays et dans les
colonies pour renverser la République.
En Navarre même, noyautée par des militaires, tel le général Mola,
cette haute bourgeoisie développe un sentiment anti “rouge” dans la
population. A partir du 31 mars 1934, Mussolini envoie aux carlistes
navarais 1,5 millions de pesetas, 200 mitrailleuses et 20 000
grenades.
Les trois autres
provinces réagissent différemment en raison du poids du PNB et de
leur tradition ouvrière et démocratique. On voit là que la pouvoir
central de Madrid a commis une lourde erreur en refusant l’autonomie
de l’Euskadi et l’instauration d’un gouvernement basque.
La tentation des
Navarrais qui se rangeront bientôt aux côtés des insurgés
franquistes aurait pu être évitée… Et comme pour le nez de
Cléopâtre, on peut dire que la face de l’Espagne aurait été
peut-être changée en faveur de la démocratie !
Toujours est-il que
le 18 juillet 1936 l’armée se soulève contre la République. Il faut
faire vite. Pêcheurs, ouvriers, paysans, petits commerçants
d’Euskadi, tous unis, neutralisent rapidement les garnisons de
Bilbao et de Saint-Sébastien. Par contre, à Pampelune (fondée par le
romain Pompée voici 2 000 ans) et à Vitoria, les militaires
espagnols rejoints par trois mille carlistes tiennent le pouvoir
localement.
La Navarre posera
problème à l’ensemble des Basques mais il ne faut pas oublier (même
si l’on ne peut tout excuser !) que le général Mola et les
franquistes fusillent des milliers de Navarrais dans l’été 36.
Combien de jeunes sont-ils alors contraints de s’enrôler dans
l’armée de Franco contre leur propre peuple, à l’instar des
Alsaciens en 1940 dans l’armée nazie?..
Le général Franco
et son armée coloniale franchissent le détroit de Gibraltar dans des
avions et des bateaux offerts par Hitler et Mussolini qui engagent
ici la 2ème guerre mondiale. Dès août 1936, les armées du nord et
celles du sud font leur jonction devant Madrid.
Le gouvernement de
la République se fixe à Valence. Les Basques se retrouvent
doublement isolés : d’une part de l’Espagne encore républicaine et
d’autre part de leurs frères du Pays Basque nord où Mola s’empare
d’Irun après quinze jours de combats atroces et malgré l’héroïsme
des ouvriers basques écrasés par les chars et bombardés par des
avions italiens.
Le 13 septembre, les franquistes occupent Saint-Sébastien. Cent
mille habitants du Guipuzcoa fuient vers la Biscaye. Mais les
combattants basques se réfugient dans le couloir industriel de la
Deva où ils bénéficient de l’appui des ouvriers et de leurs
familles.
Au matin du 27
septembre 1936, les fascistes tentent un assaut contre ce bastion
basque qu’ils pensent enlever sans difficulté. Or ils ignorent que
dans la nuit les ouvriers se sont emparés à Bilbao d’un bateau en
provenance de Hambourg qui transporte des mitrailleuses. C’est alors
un échec cuisant pour les assaillants qui reculent. Ainsi le
retranchement basque est sauvé et connaîtra un répit de plusieurs
mois.
III )
Proclamation de la République basque
Guernica, le 7
octobre 1936 ! Des centaines de basques entourent le chêne
millénaire des libertés d’Euskadi. La République espagnole vient
enfin de réaliser son erreur et devant le très grand péril qui la
menace, elle reconnaît, un peu tard, l’autonomie du Pays Basque.
Agé de 32 ans,
Aguirre forme alors le premier gouvernement basque qui sera d’unité
nationale avec cinq sociaux chrétiens, trois socialistes, un
communiste et deux libéraux. Il prête serment devant le chêne :
“Humble devant le
Seigneur d’en haut,
debout sur la terre basque,
me souvenant des ancêtres,
de bien remplir mon mandat
je fais serment.”
Malgré l’occupation
d’une partie de l’Euskadi par les franquistes, le gouvernement
d’Aguirre va réaliser un programme économique et social très
progressiste pour l’époque : assurances sociales, allocations
familiales, représentants élus des salariés dans les Conseils
d’Administration d’usines et de banques paritairement avec ceux des
propriétaires, rapports directs entre les coopératives agricoles de
production et les coopératives ouvrières de consommation.
Une université et
un enseignement public basque sont créés. L’Euskadi frappe sa propre
monnaie, arbore son drapeau, délivre des passeports, ouvre des
légations dans les pays étrangers, maîtrise les télécommunications
et la radio.
Sur le plan militaire, le gouvernement basque met en place une armée
populaire qui va donner du fil à retordre aux armées allemandes,
italiennes et franquistes. Pour mieux résister au fascisme, il
transforme l’industrie du temps de paix en fabriques d’armement et
il ravitaille activement la population assiégée et bombardée
régulièrement par la légion Condor.
Devant l’anarchie
et les massacres qui ont cours de tous côtés dans le reste de
l’Espagne, la jeune république basque fait l’admiration de plusieurs
gouvernements étrangers, en particulier celle des Anglais comme
Antony Eden le gendre de Churchill.
Le 30 novembre
1936, les Basques passent à l’offensive contre les troupes
franquistes du colonel Iglesias afin d’obliger Franco à desserrer
l’étau autour de Madrid. Mais le 5 décembre l’aviation et
l’artillerie fascistes arrêtent l’assaut basque et le général Mola
pense raser rapidement la Biscaye que bombardent les avions
allemands. La résistance acharnée des Basques lui coûtera plus de 20
000 morts et blessés, la perte de 18 avions, de nombreux tanks et
d’un cuirassé ! Il sera lui-même tué.
L’Euskadi aligne
cent mille hommes sur 120 km de front avec un armement nettement
inférieur à celui de l’adversaire franquiste qui bénéficie de la
logistique d’Hitler et de Mussolini. Les populations civiles seront
durement touchées. Un jeune ouvrier tourneur, Beldarrain, commande
une armée d’ouvriers basques décidés à barrer la route au fascisme.
Chaque fois que les
franquistes pensent opérer une percée décisive, ils sont repoussés
par les hommes de Beldarrain qui colmatent les brèches après avoir
simulé un recul pour mieux préparer une nouvelle ligne de défense.
Mais ce courage du
désespoir est à plusieurs reprises affaibli par la défection de
bataillons anarchistes qui lâchent les Basques dont ils ne partagent
pas les sentiments nationaux.
Les Franquistes qui
ne viennent pas à bout de la résistance basque font appel à
l’aviation nazie pour détruire l’Euskadi. C’est alors le massacre de
la population civile de Guernika par la légion Condor le 26 avril
1937, puis la chute de Bilbao le 19 juin suivant dont les usines
intactes fourniront désormais des armes pour Franco et Hitler.
Le gouvernement
basque et son armée se replient vers l’Ouest de la Biscaye et vont
défendre Santander qui tombera le 14 août. Aguirre, le chef du
gouvernement, songe à rallier le front catalan ; or le gouvernement
républicain espagnol replié à Valence refuse.
Le 23 août Aguirre
négocie alors une reddition auprès des Italiens qui lui donnent des
garanties pour son peuple, mais Franco exige qu’on lui livre les
Basques. Quelques responsables, dont Aguirre, réussissent à s’enfuir
pour continuer la lutte à l’extérieur.
IV )
Indifférence et ingratitude des démocraties
L’on a beaucoup
disserté sur l’échec de la République basque. Certains reprochent à
ses responsables militaires d’avoir pratiqué la méthode ancestrale
de Roncevaux dans les sommets de montagnes face aux avions nazis qui
pilonnaient et incendiaient ; d’autres, une guerre de tranchées
devant les chars, l’artillerie et l’aviation.
Rares sont les
chefs comme Baldarrain qui ont su s’adapter aux méthodes de la
guerre moderne, c’est vrai. Mais était-ce suffisant, seuls face aux
armées de Franco, d’Hitler et de Mussolini ?
Ce qui a perdu plus
sûrement la république d’Euskadi c’est l’indifférence, la lâcheté
des démocraties occidentales et en tout premier lieu de l’Etat
français, qui n’ont pas voulu voir que la bataille d’Euskadi était
une répétition générale de ce qui attendait l’Europe quelques années
plus tard.
N’oublions pas que
deux semaines après la chute de Bilbao, la société allemande Rowak
s’empare des mines de fer, des hauts-fournaux et des laminoirs qui
serviront à fabriquer les canons et les chars destinés à tirer sur
les soldats français en juin 1940 !!!
Il n’est pas
inutile à ce sujet de rappeler l’extraordinaire désintérêt manifesté
aujourd’hui, plus de 50 ans après Guernika, par les mêmes
“démocraties” occidentales envers un peuple massacré en Tchétchénie,
dans ce Caucase qui peut être le berceau paléolithique du peuple
basque.
Le 23 octobre 1940 Franco rencontre
Hitler à Hendaye et met à sa disposition la métallurgie de Biscaye
et ses bases sous-marines…
Quant aux
combattants basques rescapés, ils se battront dans les maquis
français… et le tank “Guernica” sera un des premiers à pénétrer dans
Paris libéré, tandis qu’une brigade basque défilera dans Bordeaux
avec le drapeau d’Euskadi et que de Gaulle décorera le commandant
Ordoki.
Mais quelle n’est
pas la déception, une nouvelle fois, de tous les Basques du sud
quand ils voient les Alliés désarmer la brigade basque, alors qu’ils
espéraient un appui pour abattre Franco et la dernière dictature
d’Europe.
Ainsi malgré le
lourd tribut payé à la cause de la démocratie contre le fascisme (50
000 morts ; 100 000 prisonniers ; 200 000 exilés), l’Euskadi devra
poursuivre sa vie avec l’interdiction de sa langue et en l’absence
de toute liberté politique et syndicale.
Le gouvernement
basque en exil à New-York durant la 2ème guerre mondiale
s’installera à Paris, 48 rue Singer, après 1945. C’est là que le
Président basque Aguirre invitera Robert Schumann, de Gasperi et
Konrad Adenauer qui lanceront l’idée européenne !
Jòrdi Labouysse
Source photo : Unità Naziunale et
pour "Guernica"
http://cotebasque.free.fr/guernica/
Source info :
Xarlo :
http://blogs.aol.fr/xarlo/txakal
Jòrdi Labouysse :
http://www.r-p-s.info/hist_republiquebasque.htm
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