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Communiqué de Presse - 24/07/2005

-- Energie : Lettre aux membres de l'Assemblée de Corse et du Conseil Exécutif --


Madame la Conseillère territoriale, Monsieur le Conseiller territorial,



Nous avons l'honneur de vous adresser la présente à la veille du débat sur les orientations de la politique énergétique de l'île, prévu lors de la session des 25 et 26 juillet 2005, sur la base du rapport de la mission dirigée par l'ingénieur général des Mines Jean Pierre Leteurtrois.



D'entrée, et quelles que soient vos facultés d'assimilation rapide d'un document ardu pour les non initiés, nous nous étonnons qu'un tel débat engageant la Corse pour les vingt prochaines années puisse se tenir alors que ledit rapport ne vous est parvenu que tout récemment, l'opinion publique n'en ayant pas encore pris connaissance.



En effet, la question énergétique est une composante essentielle d'un projet global de société et, à ce titre, l'ouverture à la réflexion collective et à la concertation de l'ensemble des parties prenantes institutionnelles, professionnelles, syndicales, associatives, ainsi que de toute personne intéressée, nous apparaît hautement souhaitable, sinon essentiel, comme cela avait été le cas en 1983-84 avec les Assises de l'énergie organisées par l'Assemblée de Corse (cf ci-joint le préambule de la plaquette « grand public » des Assises de l'énergie 1983-84).



Cette dynamique de concertation nous apparaît d'autant plus indispensable que le rapport précité affirme :

- « Les moyens dont dispose le Conseil Energétique de Corse pour exercer sa mission sont limités. Il s'appuie essentiellement sur l'Agence de Développement Economique de la Corse (ADEC) qui ne dispose pas d'expertise technique en matière énergétique et fait appel aux services de consultants. Il en résulte nécessairement un déséquilibre d'expertise technique entre le CEC et ses interlocuteurs, notamment EDF. » (page 21)

- «La mission déplore que le bilan prévisionnel pluriannuel 2007-2015 élaboré par EDF ne s'appuie pas sur une vision à long terme du futur énergétique de la Corse. Il en résulte des propositions au « fil de l'eau ».» (page 44)

- «Pour le moyen - long terme, la mission regrette l'absence d'une vision de long terme, et si possible consensuelle, du futur énergétique de la Corse. Les propositions du bilan prévisionnel pluriannuel 2007-2015 sont dès lors entachées d'une certaine myopie dans la mesure où elles ignorent les évolutions possibles, probables ou inéluctables du contexte dans lequel elles s'inscrivent. la mission invite la Collectivité Territoriale de Corse en liaison avec les Autorités nationales à se prononcer sur sa vision énergétique de l'île à long terme.»

- «La volonté de conduire dans l'île une politique active et déterminée de maîtrise de l'énergie fait également consensus. Mais force est à la mission de constater que les moyens mis au service de cette politique ne sont pas à la dimension des ambitions et que les résultats obtenus ne sont pas de nature à infléchir le rythme de croissance de la consommation. La mission recommande une refonte complète du dispositif consacré à la maîtrise de l'énergie mis en place par l'ADEME, la CTC et EDF qui a démontré son inefficacité. »



Un exemple saisissant de l'intérêt de la tenue d'Assises de l'énergie aujourd'hui nous est donné par la très récente conférence de presse du collectif des maires du Golu qui rappellent leur volonté de voir équipée la basse vallée du Golu de « .deux ouvrages hydro- électriques. d'une puissance totale garantie de 37,6 MW et d'un productible annuel estimé à 93,40 GWh. ». Nous rappelons que, sans compter le Rizzanese, les projets du bas Golu, du Liamone et du Taravu représentent environ 150 MW qui sont toujours dans les cartons depuis vingt cinq ans. Alors que le ministre de l'Energie François Loos, complètement décalé vis-à-vis de la réalité du dossier, affirme : « Au-delà du Rizzanese, le développement du potentiel hydro électrique reste limité. Dix MW supplémentaires pourraient être installés dans les dix prochaines années». Est-il nécessaire de rappeler à l'Etat l'importance pour une île méditerranéenne de disposer, en cette période de réchauffement planétaire, de moyens de s
tockage de l'eau indispensable au développement et à la vie ?



Concernant les délestages de février-mars 2005, nous sommes convaincus qu'EDF a voulu impressionner la population et forcer la main aux élus pour obtenir enfin l'installation du câble électrique ICO (Italie Corse) destiné à importer dans l'île les surplus nucléaires français, hypothèse jusqu'à ce jour refusée par les forces vives de l'île. Le rapport affirme :

- « EDF agit seul et avec retard pour limiter la demande. Les explications données par EDF sur l'origine de la crise sont manifestement de circonstance. » (page 33)

- « On peut légitimement reprocher à EDF un manque d'anticipation. La mise en place de la cellule de crise interne à EDF, l'alerte des pouvoirs publics et l'information de la population ne sont intervenues que le premier jour des délestages. A l'examen des prévisions météorologiques, EDF ne pouvait ignorer 3 ou 4 jours avant qu'il faudrait selon toute probabilité recourir à des délestages. Une meilleure anticipation des évènements aurait sans doute permis d'atténuer les effets de la crise. » (page 36)

- « La mission s'est forgée la conviction que c'est tardivement, à la veille des délestages, qu'EDF a envisagé d'utiliser ses TAC en base. La mise en place dans l'urgence d'une logistique adaptée a, inévitablement, nécessité des délais et entraîné des surcoûts.» (page 36)

- « Le moteur 1 de la centrale du Vazzio était indisponible depuis plusieurs mois privant le réseau d'une puissance de 19 MW, dont 15 MW de puissance de base. La DRIRE s'était inquiétée de ce déficit de puissance. Par courrier du 15 janvier, elle avait demandé à EDF de lui faire connaître les mesures qu'il entendait prendre pour remédier à cette situation. Ce courrier est resté sans réponse. » (page 29)



S'agissant du câble ICO, il est évident pour I Verdi que son installation signerait la mise définitive aux oubliettes des ouvrages hydro-électriques précités et la réduction de la maîtrise de l'énergie et de la mise en valeur des énergies renouvelables à une peau de chagrin.

De plus, il y aurait un manquement grave à l'éthique dans la mesure où, à notre connaissance, aucune commune de l'île n'accepterait d'enfouir dans son sol des déchets nucléaires.

Par ailleurs, il est utile de rappeler que la production d'électricité nucléaire est étroitement liée au refroidissement des réacteurs par l'eau des fleuves, ces derniers étant de plus en plus affectés par le réchauffement climatique, ce qui a entravé pendant l'été 2003, le fonctionnement de plusieurs centrales nucléaires françaises. Quant à la sècheresse de l'été 2005, elle semble sérieuse.



Enfin l'annonce ministérielle de la reconstruction des centrales du Vazziu et de Lucciana avec des moteurs neufs et moins polluants que les moteurs actuels nous amène à nous demander si l'Etat ne nous prend pas pour des imbéciles.

Ainsi, après avoir prétendu il y a quatre mois que les capteurs de pollution ne fonctionnaient pas correctement, quand ils annonçaient la grave pollution des moteurs actuels du Vazziu, voici venu le temps du remplacement par des moteurs qui seraient moins polluants. Ce qui est une manière de reconnaître que le site est actuellement très pollué. Quant au choix réitéré du recours au fuel, il apparaît aberrant, sachant que le prix du baril ne cesse d'augmenter : 58,60 dollars le 22 juillet 2005 !

Dans le même temps, ni le ministre, ni le rapport Leteurtrois n'évoquent l'éventualité du remplacement des deux centrales diesel au fuel du Vazziu et de Lucciana par des centrales à gaz GPL. Pourquoi cette omission surprenante ? Ce n'est pas la CTC qui pourra répondre à cette question puisque, selon le rapport, elle ne dispose pas d'expertise technique en matière énergétique.



Pour I Verdi, il apparaît clairement que l'hypothèse retenue par le rapport induit le choix de l'autoroute nucléaire qui fermerait les centrales du Vazziu et de Lucciana « nouvelle génération », peu de temps après leur ouverture du fait des hausses constantes du prix du fuel qui constituent désormais une donnée structurelle et non plus ponctuelle. A moins que ces nouveaux équipements devenus trop coûteux ne fonctionnent jamais. ?



Quant à l'ensemble des énergies renouvelables et à la maîtrise de l'énergie, quelques projets feront « passer la pilule ». Et le tour sera joué au détriment du développement durable et équilibré du potentiel énergétique insulaire qui est réparti sur toute l'île, en relation avec le développement de l'intérieur et l'agriculture, l'adduction d'eau potable, la lutte contre les incendies, le BTP, le développement artisanal et industriel pour la fabrication de composants et la maintenance des équipements,.



Madame la Conseillère territoriale, Monsieur le Conseiller territorial, vous avez le devoir de vous entourer de tous les avis et de prendre toutes les précautions avant de décider quelles seront les orientations de la Collectivité territoriale en matière de politique énergétique.



Demain, en tant qu'élu(e) du peuple, vous serez responsable et comptable des conséquences de vos décisions.

Vous ne pouvez pas être complice d'un mauvais coup porté à la Corse !

Aussi, nous vous demandons d'organiser dans les meilleurs délais de nouvelles Assises de l'Energie sur une durée minimale de trois mois, dans l'esprit des Assises de 1983-84, afin de permettre le travail effectif de plusieurs commissions qui rendraient leurs travaux en novembre, ce qui permettrait à l'Assemblée de Corse de voter en décembre 2005.



Dans l'espoir que notre courrier retiendra toute votre attention, nous restons à votre disposition pour toutes informations complémentaires ou échanges et vous demandons de recevoir, Madame la Conseillère territoriale, Monsieur le Conseiller territorial, l'expression de notre considération distinguée,





Pour I Verdi Corsi :



Les porte parole



Francine Bègue Tramoni - Jean Graziani - Norbert Laredo

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I VERDI CORSI