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Message pour la journée du prisonnier politique du 17 avril 2008 : A tous ceux qui luttent !

Le 16 avril 2008 : (12:59 Unità Naziunale, www.unita-naziunale.org - Corse - Lutte Internationale)  Le voile noir de la réaction flotte sur l'Europe. Pas une année sans qu'un pays ne tombe sous la coupe de la droite extrême. Quant à leurs soit disant adversaires, ils ne valent guère mieux si ce n'est qu'ils sont pire en alliant la bonne conscience à la dictature libérale. L'Otan et le militarisme sécuritaire gagnent du terrain dans les têtes et sur les champs de bataille.

Nous devons partir de ce constat : le mouvement révolutionnaire a quasiment disparu de l'horizon continental.

Bien sûr, ici et là des poches de résistance dressent encore nos drapeaux. Ailleurs les militants anti-capitalistes s'engagent tant bien que mal dans des processus de recomposition. Ces processus sont fragiles et souvent contradictoires mais ils ont l'infini mérite de dépasser l'aveuglement des ghettos et les alibis sectaires de la décomposition.

Depuis des années, seule une infime minorité de militants se préoccupe de la détention politique. Les autres demeurent sourds et absents. Et beaucoup la nient tout bonnement à coup de postulats dogmatiques. Pour quelques uns « il n'y aurait pas de prisonniers politiques » et pour d'autres « il ne s'agirait que de terroristes ayant le sort qu'ils méritent ». Cette arrogance de la fausse radicalité et ce conformisme frileux découlent tous deux de nos défaites collectives et du recul des positions révolutionnaires.

Ainsi les justifications se tricotent à la veillée pour ne jamais participer aux mobilisations solidaires chargées de trop de poudre et de sang.

Et quand ils y participent, par exemple, lors d'une campagne contre l'extradition menaçant un militant, ils sont d'autant plus confortés lorsque le détenu, pour se sauver, renie son engagement passé, critique les actions commises ou claironne ad nauseam le refrain de l'innocence.

Ainsi, au fil des années sur le terrain de la solidarité, la dépolitisation s'est aggravée.

Aujourd'hui, il n'est pas rare d'entendre dans la bouche de nombreux militants le discours du pouvoir bourgeois à propos de la loi, du droit et de la justice, et avant tout dans la condamnation de la violence révolutionnaire.

Lors des tentatives actuelles de recomposition de la gauche révolutionnaire, nous, prisonniers politiques et avec nous les membres des plus anciens groupes de soutien, avons le devoir d'introduire et de débattre de la question de la détention politique et ainsi de la replacer au cœur des préoccupations militantes.

Ainsi nous enrichirons de nos expériences le camp anticapitaliste et participerons à la conscientisation et aux actions de la solidarité de classe. Sur le terrain de la détention politique, cette solidarité ne peut être un positionnement éthéré, elle réclame des mobilisations conséquentes, une convergence de larges secteurs et une pratique de longue durée.

Et sur la base des combats passés et présents, elle doit se développer autour de deux revendications permanentes :

- Dissolution des tribunaux d'exception et abrogation des lois spéciales.

- Amnistie des prisonniers politiques.

Cependant nous sommes d'accord, la détention politique n'épuise pas la question de la prison ni bien évidemment celle de la répression de classe, mais plus que jamais à notre époque, elle se situe au cœur du système répressif et matérialise la menace permanente contre tous ceux qui osent s'organiser, lutter et résister. Et en premier lieu contre ceux qui entrent en rupture avec la collaboration et le régime autoritaire libéral.

La détention politique est le nœud gordien du système répressif. Là où s'inscrit jour après jour en béton et en fil barbelé la violence de l'Etat réactionnaire.

La détention politique constitue un des baromètres du rapport de force et de l'antagonisme des classes.

Aujourd'hui près de 300 prisonniers politiques sont enfermés dans ce pays, ils subissent un arbitraire quotidien ; censure, dispersion, brimades, interdits... Et certains camarades sont isolés, quelques-uns depuis des années et des années.

Le seul but de ce traitement est de les briser et de les retourner contre leur propre engagement. Les tribunaux spéciaux espèrent ainsi les utiliser dans les campagnes de contre-propagande pour la pacification sociale et politique.

Pour l'Etat, un détenu qui agit en prisonnier politique et revendique son action passée est à éliminer. Depuis des années, la multiplication des lois sécuritaires et des instances spéciales (en particulier la perpette réelle et la création de l'application des peines anti-terroriste) œuvrent à cadenasser le système du « nouvel anti-terrorisme ». Si de nos jours, cette menace n'atteint pas encore l'ensemble de la gauche anti-capitaliste, cela ne tardera pas dès les premiers signes d'une reprise de pratiques contestataires de masses.

Quand nous en serons à cette étape, notre conscience et notre expérience se révèleront décisives.

Voilà pourquoi la question de la détention politique doit être inscrite comme un des points cruciaux de la recomposition de la gauche révolutionnaire.

La répression des résistances de notre classe mondiale et des peuples opprimés est l'axe fondamental de la guerre en cours frauduleusement dénommée « guerre contre le terrorisme et pour la sécurité ». C'est la nouvelle forme de la lutte de la classe bourgeoise impérialiste où elle inscrit à chaque étape la criminalisation jusqu'à la négation totale des questions politiques posées par l'opposition à ses planifications les plus sordides. Comme le procès de travail, la répression, la guerre impérialiste et la guerre civile sont mondiales. Aucun sujet d'actualité ne peut être abordé séparément de ses implications transnationales. Et à chaque instant, notre solidarité de classe est un combat brisant les murs et les frontières.

La semaine passée, la bourgeoisie et les bobos défilaient dans les rues en brandissant les photos de militaires et de policiers colombiens dont beaucoup sont des tortionnaires du régime narco-libéral et les complices des escadrons de la mort. Aujourd'hui, je veux adresser un message de solidarité aux détenus et guérilleros des FARC et de l'ELN. Auquel j'y ajouterai un salut pour les camarades chiliens du FPMR détenus dans les prisons brésiliennes de Lula. Et également pour les prisonniers du PCP et du MRTA, enterrés vivants dans les geôles du gouvernement social-démocrate péruvien.

Alors que les forces impérialistes et colonialistes sont engagées dans l'agression « anti-terroriste » contre les peuples du Moyen-Orient, je terminerais par un message de solidarité destiné aux résistances palestiniennes, libanaises et irakiennes, fer de lance des peuples de la région et à leurs prisonniers politiques :

- A tous ceux qui subissent les agressions de l'OTAN, des sionistes et de l'armée US

- Aux habitants des villes et des camps bombardés.

- Aux populations livrées aux mercenaires et autres supplétifs et menacées par les escadrons de la mort et les « assassinats ciblés ».

- Aux résistants arrêtés, torturés, enlevés, déportés à Guantanamo ou disparus dans les prisons secrètes de la CIA.

- Aux milices ouvrières des quartiers populaires de Bagdad, aux grévistes et aux émeutiers du Caire.

- Aux prisonniers communistes libanais, Samir Kuntar détenu dans les geôles de l'Etat sioniste depuis 1979 et au camarade Georges Ibrahim Abdallah, emprisonné en France depuis octobre 1984.

A tous ceux qui résistent !

Votre combat est notre combat !

J. Marc Rouillan
Prisonnier Politique d'Action Directe
Prison des Baumettes
Marseille avril 2008

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