Le
25 mai 2009 :
(13:00
Unità Naziunale,
www.unita-naziunale.org - Corse - Lutte de Masse) Ce
n'est pas la récompense suprême mais c'est un Grand Prix qui va
certainement faire beaucoup de bruit en Corse.
Hier soir,
sur l'immense scène du palais du festival de Cannes, Jacques Audiard
a manqué de peu la Palme d'or attribuée à l'excellent Ruban blanc
de Michaël Haneke qui évoque les origines du nazisme.
Mais le
fils du célèbre scénariste Michel Audiard a tout de même obtenu à
l'unanimité du jury présidé par Isabelle Huppert le Grand Prix 2009
pour son film Un prophète.
Suite à sa
projection, le 16 mai, cette oeuvre a suscité une vive polémique,
tant à Cannes qu'en Corse.
Sur la
Croisette, les cinéphiles insulaires qui ont eu l'occasion de voir
ce drame sur le terrible univers carcéral français furent très
choqués. Il faut dire que le héros n'est autre qu'un jeune maghrébin
qui devient littéralement l'esclave d'un vieux truand corse du nom
de César Lucciani et de sa bande de malfrats sanguinaires. Pour le
clan des insulaires, il accomplira toutes sortes de missions plus
violentes les unes que les autres : il égorgera notamment une «
balance » devant témoigner contre des Corses lors d'un procès à
Paris.
Des réactions politiques
Comme l'a
précisé dans nos colonnes René Viale, le président du festival
italien de Bastia, « le problème de ce film est qu'il montre les
prisonniers corses sous leur plus mauvais jour. L'hémoglobine coule
à flot. Cela donne une image déplorable, voire détestable, de notre
région ». Le président de la cinémathèque régionale de Corse,
Dominique Landron, a amèrement regretté « l'amalgame qui est fait
entre les nationalistes et les voyous ». Il a également déploré
« la grave erreur du film qui affirme que le gouvernement a
autorisé de manière officielle le
rapprochement des prisonniers corses à la prison de Borgo, ce qui
est faux ».
La
polémique est même allée au-delà de l'univers purement
cinématographique. Le député de Haute-Corse, Sauveur Gandolfli-Scheit,
a en effet dénoncé « un racisme à rebours ». Selon lui, «
il faut que les élus insulaires se mobilisent afin que cessent les
diffamations anti corses ». « Nous n'avons pas une vocation
éternelle à nous laisser insulter impunément » a-t-il dit haut
et fort. De leur côté, les nationalistes de Corsica Libera ont
précisé que « ce film relaie, inconsciemment ou non, une campagne
menée par l'État français depuis bien longtemps. La confusion
entretenue entre militants politiques et voyous, insulte, comme cela
est devenu habituel pour certains, la Corse et son peuple ».
Pour Corsica Libera « cette démarche est également de nature à
rendre dangereuse la situation des prisonniers politiques corses
dans les prisons françaises ».
«
Une projection- débat serait souhaitable en Corse »
Comme Un
prophète a eu une audience internationale à Cannes, il est
évident que les Corses sont passés, aux yeux de tous, pour des êtres
se complaisant dans la violence, le banditisme et le racisme.
Pour
exemple, le critique du journal « Le Monde » Jacques Mandelbaum, a
écrit : « Ce film est un miroir tendu à une
société de plus en plus éclatée, en butte à la montée des
revendications communautaristes et de l'esprit clanique. Cela
expliquerait le sort réservé par Jacques Audiard à la mafia corse
dont le code d'honneur se révèle pourri par le chauvinisme et le
racisme ».
Pratiquement parlé en langue corse de bout en bout, Un prophète
sortira sur les écrans le 26 août. Comme l'a souligné René Viale,
il serait souhaitable qu'une avant-première soit organisée sur l'île
en présence des comédiens insulaires du film et surtout du
réalisateur qui pourrait, dès lors, s'expliquer publiquement sur ses
motivations. Un contact va être pris rapidement avec les
distributeurs pour essayer de mettre sur ce pied cette
projection-débat.
Jean-baptiste Croce
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