Conférence de presse
Unione Naziunale
28 avril 2005
Nous sommes ici aujourd’hui, pour dénoncer un
crime contre la Corse, un de plus… Sur cette terre gorgée d’histoire, sur
laquelle nous sommes actuellement, nous venons porter témoignage et nous opposer
avec la plus grande fermeté au coup bas qui se prépare contre notre patrimoine
culturel.
La destruction systématique de notre
culture, devient chaque
jour, un peu plus insupportable et chaque corse le ressent comme la perte d’une
partie de lui-même.
Ici, la Corse romaine nous parle.
Ici, nous sommes sur un des hauts lieux de l’Histoire classique et médiévale de
la Corse.
Ici, nous sommes au cœur de cet
ADJACIUM cité par Grégoire le Grand et de l’AGIATION de l’anonyme de Ravenne.
Ici, 2000 ans d’Histoire voire
davantage nous adresse un puissant message. Peut-être vont-ils nous conter la
fabuleuse aventure humaine de la ville d’OURKINION du géographe d’Alexandrie,
Ptolémée qui écrit au deuxième siècle de notre ère.
Ici, nous sommes sur les lieux de
cultes de nos lointains ancêtres préchrétiens, paléochrétiens et médiévaux.
Ici, nous sommes sur une immense
nécropole deux fois millénaire, et nous ne sommes pas loin du port d’époque
romaine dont certains vestiges ont été mis au jour lors de l’aménagement du port
de l’amirauté.
Les municipalités qui se sont
succédées à la tête de la ville d’Aiacciu ont toutes fait table rase du passé.
Beaucoup d’entre nous se souviennent
des vestiges de fortifications détruits à l’aube, sans témoins, non loin de la
cathédrale, par un maire qui est encore présent dans toutes les mémoires.
Il est encore temps de rendre
justice à Aiacciu en lui restituant son lointain passé.
C’est pour cela que nous, Corses
d’aujourd’hui, respectueux de ceux d’hier, et soucieux de ceux de demain,
demandons immédiatement le gel du funeste projet qui se met en place en ces
lieux.
Aujourd’hui, nous sommes en train
de découvrir un site majeur. Mais nous en sommes arrivés là avant tout grâce
à la mobilisation de la population, à travers certaines associations qui ont
pris en main ce dossier et certainement pas grâce à la mairie d’Aiacciu qui n’a
rien fait, ou pas grand-chose.
Une fois de plus, le Service
Régional de l’Archéologie (SRA) n’a pas rempli son rôle. Le SRA n’a pas fait le
nécessaire et n’a pas jugé utile de réagir face à la destruction programmée
de ce site. Les responsables de ce service sont coutumiers du fait, ce n’est
pas la première fois qu’ils ne réagissent pas alors que des sites majeurs sont
en danger. Nous estimons que des intérêts supérieurs financiers ont fait
fermer les yeux du SRA bien qu’ils soient sur place ! Et si l’institut
national de recherches en archéologie préventive (INRAP) a été appelé, ce n’est
que grâce à la forte mobilisation populaire.
Nous exigeons la mise à l’écart
définitive de l’actuel conservateur régional de l’archéologie
pour incompétence et complicité de destruction de notre patrimoine. Comment un
individu qui est coresponsable de la destruction d’une ville de l’âge du Bronze
à Purtichju au cœur de la rive sud, une ville vieille de 4000 ans avec ses
remparts, sa plate forme cultuelle, sa torra centrale, ses zones
d’habitations, sa zone artisanale et sa zone funéraire, pourrait-il aujourd’hui
défendre ce site majeur de San Ghjuvan Battista ou les autres sites de notre
patrimoine ?
De plus, nous signalons qu’à notre
connaissance, aucune information du début des travaux n’a été transmise aux
services archéologiques compétents et que le personnel chargé d’effectuer les
fouilles en cours a été recruté sans publicité, sans concours ou appel à
candidature. Nous pouvons donc estimer que le recrutement a été fait uniquement
par « copinage », une fois de plus. Nous remarquons d’ailleurs qu’aucun
étudiant issu de l’Université de Corse ne travaille aujourd’hui sur ce chantier,
comme sur d’autres d’ailleurs. La joyeuse époque des « missionnaires » est de
retour…
Nous demandons que l’Université de
Corse soit associée aux fouilles à venir.
Nous lançons un appel à la
municipalité d’Aiacciu afin que tout soit mis en œuvre pour sauver San Ghjuvan
Battista de la destruction.
Les fouilles actuelles ne concernent
qu’une infime partie du site. Nous exigeons que l’ensemble du site soit
fouillé et préservé.
Nous en appelons aux différentes
collectivités locales et à l’Assemblée de Corse pour dégager les moyens
nécessaires aux acquisitions foncières. Nous disons qu’il n’est point dans notre
intention de léser des Corses propriétaires, la ville d’Aiacciu se doit de leur
offrir les mêmes conditions en un autre lieu. Nous saluons la démarche de
monsieur Jacques Billard, vice-président du Conseil Général et le rejoignons
dans certaines de ses analyses et propositions.
Enfin, nous appelons notre peuple à
lutter avec nous pour faire cesser les atteintes inqualifiables portées à notre
terre et son histoire multimillénaire.
Dès aujourd’hui, nous lançons une
pétition pour que la Corse entière puisse s’exprimer et exiger que San
Ghjuvan Battista ne soit pas sacrifié sur l’autel de la spéculation.
Nous exigeons le retour du matériel
mis au jour depuis des décennies concernant ce site et notamment le sarcophage
dit « du bon pasteur » qui sert actuellement de cendrier aux CRS de garde à la
préfecture d’Aiacciu !
A travers le monde entier, chaque
ville qui a la chance de posséder des traces de son passé lointain a fait le
nécessaire pour les mettre en valeur, parfois en partant de pratiquement rien.
En Corse, nous avons la chance d’avoir 9000 ans d’Histoire au moins et il est de
notre devoir de mettre en valeur cette richesse extraordinaire. La Corse entière
est un musée à ciel ouvert mais l’Etat français, avec la complicité de ses
relais locaux, serviles et dociles, a programmé notre aliénation culturelle
totale afin que nous soyons un peuple de chèvres comme certains académiciens
français complices ont tenté de l’attester.
N’oublions pas que le système
scolaire actuellement mis en place en Corse passe sous silence notre histoire.
Nous nous battrons toujours contre
l’aliénation de notre culture, sous toutes ses formes.
Nous demandons aux collectivités
compétentes de travailler sur un projet d’aménagement de ce site afin d’en
faire, pourquoi pas, un musée de site, à l’image de ce qui a été réalisé à Nice
dans les années 60 lors de la découverte du campement de Terra Amata où un musée
de site a été inséré dans le projet immobilier. On peut aujourd’hui encore
visiter ce musée qui est au rez-de-chaussée d’un immeuble.
Nous demandons également à la
Collectivité Territoriale de Corse, qui en a la possibilité depuis les récents
transferts de compétence dont elle a bénéficié dans le cadre la loi Jospin, de
se doter dans les plus brefs délais d’un conseil scientifique élargi où
l’Université de Corse doit avoir une place prépondérante, mais où doivent être
aussi présentes toutes les associations qui s’intéressent à l’étude et à la
valorisation du patrimoine pour éviter le mortel monopole de fait du SRA ou de
l’INRAP. Dans ce conseil siègeraient également les institutionnels (différentes
collectivités).
Face à la spéculation, face au
danger d’aliénation culturelle, seule la vigilance et la mobilisation populaire
pourront sauver notre patrimoine. L’Unione Naziunale sera toujours présente
pour défendre les intérêts supérieurs de la Corse.
Source photo :
Unità Naziunale, Archives du site.
Source info :
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